Nous sommes fatigués. Payez nos droits, et on s’en va.
Ces mots sont sur les lèvres des employés d’Interstis Cameroun cette matinée du 15 avril 2024. Et pour cause, le personnel de ce Centre d’appel spécialisé dans les prestations de services, installé au Cameroun depuis 13 ans est en grève. Près de 100 personnes ont pris d’assaut le siège de l’entreprise à Bastos, un quartier réputé calme à Yaoundé. Badges autour du cou, pancartes entre les mains, les membres de la « famille Interstis Cameroun » crient au respect de leurs droits. La scène digne du scénario hollywoodien attire des curieux. Les piétons observent attentivement le spectacle. Les automobilistes ralentissent devant la foule en furie, le regard tourné vers le rassemblement.
Les causes à l’origine de ce mouvement d’humeur, une cessation de paiement de l’entreprise. Aussi, selon les témoignages recueillis par l’équipe d’Album Social sur les lieux, l’institution veut faire migrer ses employés d’un contrat à durée indéterminée vers un contrat à durée déterminée de deux ans. Cette situation inquiète les « maîtresses de maison ». Comment vont-elles passer les fêtes de fin d’année ? La question brûle les lèvres de Stéphanie.
Nous sommes des femmes, des épouses et des mères. Nous préparions Noël et le nouvel an. Tout le monde voudrait acheter des cadeaux pour ses enfants, mais il se trouve qu’aujourd’hui, si on ne signe pas de contrat à durée déterminée de deux ans avec la nouvelle société, on n’a pas de travail. Donc, nous ne serons pas rémunérés pour les mois de novembre et de décembre. Qui s’occupera de nos familles ?
s’interroge Stéphanie Sidje, déléguée du personnel à Interstis Cameroun.
La voix des femmes portée
Les revendications portées par Stéphanie et ses collègues portent également sur les droits des femmes au sein de l’entreprise. La dame capée de huit années au service d’Interstis Cameroun est particulièrement inquiète pour les femmes enceintes.
Nous ne refusons pas de travailler, mais avant de se remettre au travail, nous voulons être rassurés. En tant que femmes, nous avons des congés de maternité pour celles qui sont enceintes. Sauf que l’employeur nous a notifiés par voie orale qu’il ne peut plus nous payer. Que deviennent les femmes enceintes qui devraient avoir des congés de maternité payés ? Nous n’avons pas de réponse. Qu’est-ce qu’on fait de nos congés annuels pour l’année passée ? Personne ne nous répond également,
poursuit la déléguée du personnel.
Les employés mécontents ont d’ores et déjà engagés des procédures auprès des services compétents, pour que justice soit faite.
Nous nous sommes rendus à l’Inspection du travail, et on a rencontré les employés de Interstis qui se sont sentis abusés. Nous, les délégués, avons déposé une plainte pour nous dédouaner de la procédure que le directeur de la production, Stanislas Assoa, nous a donné. Nous avons déposé une deuxième plainte pour abus de confiance. Nous avons également déposé la convocation à la Délégation mercredi dernier. Nous avons par la suite pris attache avec un avocat qui nous a donné la marche à suivre,
explique Arold Hans Manyaka Mbu, délégué du personnel.
Locaux interdits d’accès, sécurité renforcée autour du bâtiment, l’on n’a pas pu recueillir la version du top management d’Interstis Cameroun. En attendant qu’un consensus soit trouvé, le mot d’ordre est lancé. Le personnel s’est donné rendez-vous, le 18 novembre 2024. Tous vêtus de noir, ils comptent continuer le combat pour leurs droits devant le siège de la société française au Cameroun.