Pendant une semaine, du 21 au 27 juin 2025, la région de l’Extrême-Nord du Cameroun a été le théâtre d’une mobilisation sanitaire sans précédent. Lancée sous la houlette du ministère de la Santé publique, la quatrième édition de la campagne « Promotion Santé » a permis à plus de 500 000 personnes de bénéficier gratuitement de soins médicaux dans des zones parmi les plus enclavées et marginalisées du pays.

Cette édition 2025 a su se distinguer par l’ampleur et la diversité de son offre. Les populations de Bogo, Kaélé, Maroua, Mokolo, Mora, Ziling et Mokong ont pu accéder à des consultations médicales générales et spécialisées, des soins préventifs et curatifs, des dépistages de pathologies majeures, des vaccinations, des soins bucco-dentaires, ainsi qu’à des opérations chirurgicales, notamment en ophtalmologie. Des équipes mobiles ont été déployées pour atteindre les zones les plus reculées, assurant ainsi une couverture équitable. Les femmes enceintes, les enfants, les personnes âgées et les personnes atteintes d’affections chroniques ont fait l’objet d’une attention particulière, dans une logique d’équité et de justice sociale.

Les chiffres témoignent l’impact

Les chiffres finaux parlent d’eux-mêmes : la campagne a largement dépassé ses objectifs initiaux, avec 514 364 personnes sensibilisées, contre 500 000 prévues, soit un taux de réalisation de plus de 102 %. Les consultations médicales ont atteint 185 203 cas, tandis que les actes chirurgicaux, souvent inaccessibles dans ces zones, ont connu un engouement inattendu. Les opérations de la cataracte, par exemple, ont permis à 1 409 personnes de retrouver la vue, dépassant de 20 % les prévisions. Les chirurgies bucco dentaires ont touché plus de 1 100 patients, et de nombreuses interventions générales ont été réalisées sur place, réduisant les besoins d’évacuation vers les grands centres urbains. Le dépistage a également été au cœur de cette action : 14 000 personnes ont été testées pour l’hépatite, 6 800 pour le VIH, et plus de 3 000 cas de tuberculose ont été dépistés. Ces résultats traduisent à la fois l’efficacité de la campagne et l’ampleur des besoins non satisfaits dans cette partie du pays.

Des témoignages poignants, une reconnaissance unanime

Dans les centres de santé, les récits des bénéficiaires bouleversent autant qu’ils éclairent. À 62 ans, Mme Aissatou, opérée de la cataracte, témoigne avec émotion

Je revis. Je pensais ne plus jamais voir le visage de mes petits enfants.

Quant à Ibrahim, un adolescent de 14 ans diagnostiqué et pris en charge pour la tuberculose, ses parents n’ont pas caché leur soulagement

Sans cette campagne, nous aurions été livrés à nous-mêmes.

Un engagement collectif et solidaire

Au-delà des équipes nationales, la réussite de cette opération a reposé sur une mobilisation exceptionnelle : professionnels de santé venus de tout le pays et même de l’étranger ONG, partenaires techniques et financiers, entreprises citoyennes, et bénévoles de tous horizons. L’Organisation mondiale de la Santé, l’UNICEF, le Fonds mondial, mais aussi plusieurs mécènes locaux, ont apporté un appui déterminant en médicaments, équipements et logistique. L’abnégation des équipes, souvent confrontées à des conditions climatiques difficiles, a été unanimement saluée.

Le succès de Promotion Santé 2025 a provoqué un élan d’enthousiasme dans la région, mais également une série de revendications : prorogation de la campagne, augmentation des localités couvertes, voire extension à d’autres régions du pays, notamment dans l’Adamaoua, le Nord, ou l’Est. Des patients venus du Tchad voisin ont également bénéficié des soins, illustrant la portée transfrontalière et humanitaire de l’initiative. Une réalité qui interpelle et plaide pour un mécanisme de coopération sanitaire régionale.

Un tremplin vers la couverture santé universelle

La campagne s’inscrit dans le cadre plus large du déploiement progressif de la Couverture Santé Universelle (CSU) au Cameroun. En apportant gratuitement des soins à des populations souvent exclues du système sanitaire, elle matérialise l’ambition de l’État de garantir un accès équitable et sans barrière financière à des services de santé de qualité. Mais surtout, elle ne se limite pas à une réponse ponctuelle : des activités de sensibilisation, de formation du personnel, de communication pour le changement de comportement, ainsi que l’implication active des autorités traditionnelles et religieuses visent à renforcer durablement le système de santé communautaire.