Le sida, le paludisme et la tuberculose. Trois maladies infectieuses, principales causes de la mortalité dans le monde. Ces pathologies affectent principalement les pays en développement plus spécifiquement ceux de l’Afrique subsaharienne. Le Cameroun faisant partie de cette région, fait face à ces épidémies de manière mixte et généralisée sur toute l’étendue de son territoire. Le Fonds mondial s’est engagé à soutenir le pays dans la lutte contre ces maladies. Cependant, le Fonds a décidé de revoir à la baisse le montant du financement alloué à cette lutte.
Il passe ainsi de 123,3 millions d’euros (80,94 milliards de FCFA) à 75,3 millions d’euros (49,47 milliards de FCFA). Soit, une baisse de 29 % en valeur relative et de 48 millions d’euros (31,47 milliards de FCFA) en valeur monétaire. Les raisons de cette réduction de ce financement sont multiples. Notamment, selon des sources fiables, le non-respect des engagements financiers de l’État en termes de contrepartie. Pour la période 2021-2023, ce Fonds attendait du Cameroun 123,3 millions d’euros de cofinancement de la lutte contre ces maladies. Malheureusement, le pays n’a versé que 28% de ses engagements, soit 34,6 millions d’euros (environ 22,71 milliards de FCFA), ce qui n’a pas permis de
satisfaire aux exigences minimales,
déplore Ibrahim Faria, chef d’équipe régionale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre,
dans un mémo du rapport de la mission effectuée par ce dernier du 26 février au 6 mars 2024.
Les reproches du Fonds mondial
Le Cameroun représenté par le ministère de la Santé publique (Minsanté), est accusé par le Fonds mondial d’avoir effectué l’achat de congélateurs de seconde main pour lesquels le pays a déboursé environ 350 millions de FCFA. Ce que le Fonds considère comme « dépenses indélicates ». D’après ce bailleur, le Cameroun doit rembourser les fonds injectés dans ces dépenses dites douteuses. Aussi, exige-t-il, les rapports de financement des années 2022 et 2023.
Lors d’une vérification récente de 249 congélateurs de laboratoire achetés par l’Unops d’une valeur de 652 125,84 dollars US et distribués aux établissements de santé, il a été constaté que les congélateurs distribués sur place étaient des congélateurs d’occasion d’une marque différente de celle que l’UNOPS prétend avoir achetés sur la base de la documentation mise à disposition ; sur les sites visités, 32 congélateurs sur 33 étaient non fonctionnels. Un seul congélateur fonctionnel a été réparé par la direction du site avant d’être utilisé ; il a également été signalé le non-respect des obligations contractuelles concernant la livraison, l’installation et la formation du personnel sur les équipements de santé achetés,
dénonce le rapport du FM (Cf. page 5).
La qualité de la gestion des médicaments par le Cameroun est par ailleurs critiquée. Selon certaines sources, il n’existe pas d’outil permettant d’assurer le suivi en temps réel ou semi-réel de la chaîne d’approvisionnement et des stocks. D’énormes quantités de médicaments sont par exemple arrivées à expiration dans les magasins de la Centrale nationale d’approvisionnement en médicaments et consommables médicaux essentiels (Cename) et des Fonds régionaux pour la promotion de la santé (FRPS). L’on note aussi le manque de preuves des dépenses nationales liées aux engagements de cofinancement énoncés dans la lettre d’engagement.
La justification du Minsanté rejetée
Pour se défendre, le ministère de la Santé publique a justifié ces retards par « une variété de problèmes », notamment, les taux de change des devises. Toutefois, cet argument a été rejeté par le bailleur de fonds qui, après des réunions avec la BEAC (Banque des États de l’Afrique centrale) et la CAA (Caisse Autonome d’Amortissement), a conclu qu’il n’y avait pas de retard ou d’obstacles aux transferts de devises.
Si le Minsanté ne trouve pas d’explications concrètes à toutes ces accusations, le Cameroun pourrait se retrouver en rupture de stocks de médicaments, mettant la vie des patients en danger, étant donné qu’il n’y a plus de marge de manœuvre sur le budget des subventions du Fonds mondial. Le non-respect de ces engagements aura également un impact direct sur le montant de la prochaine allocation. Cette dernière sera basée sur les résultats programmatiques de l’année 2024, et sur la concrétisation des engagements de cofinancement des années 2024 et 2025, informe le Fonds mondial.