Plus que 6 ans, et la tuberculose ne devrait plus avoir droit de cité au Cameroun. C’est du moins l’objectif que s’est fixé le gouvernement à travers son plan stratégique national du Programme National de Lutte contre la Tuberculose (PNLT), pour la période 2020-2024, le cadre de référence des interventions de lutte contre la tuberculose dans le pays. Et dont la vision est « un Cameroun sans tuberculose : zéro décès, plus de morbidité, ni de souffrances dues à la tuberculose », et sa mission, mettre fin à la tuberculose au Cameroun à l’horizon 2030.
Mais, cet ambitieux objectif pourrait ne pas être atteint à cette échéance. Ce, du fait des financements qui ne sont toujours pas à la hauteur de porter cette ambition. Dans le cadre de la mise en œuvre de sa stratégie nationale de lutte contre la tuberculose, 2020-2024, le Cameroun a bénéficié de l’appui des partenaires techniques et financiers, notamment du Fonds Mondial, avec une nouvelle allocation d’un montant de 16 662 421 euros (10 929 831 692 F CFA), pour la période 2021-2023.
Bien plus, depuis l’année 2019, l’Initiative présidentielle du gouvernement américain pour le renforcement des activités de la lutte contre la tuberculose et le VIH apporte un financement d’environ 1 000 000 de dollars par an à la lutte contre la tuberculose. Ces subventions visent l’intensification de la recherche des cas manquants de tuberculose à l’échelle nationale et la prise en charge des activités collaboratives de la lutte contre la tuberculose et le VIH.
Ces financements viennent compléter les investissements de l’État dans la lutte contre la tuberculose qui varient entre 1 et 2 milliards FCFA chaque année depuis les 10 dernières années. Sauf que le plan stratégique fait encore face à la problématique du financement, du fait notamment de la faible capacité de mobilisation des ressources domestiques (co-financements), liée aux procédures de passation des marchés publics. Mais aussi du non approvisionnement du compte du programme en Fonds pour la mise en œuvre des activités du deuxième et troisième trimestres. Tout comme l’on peut déplorer l’infructuosité de plusieurs marchés qui ont été reconduits en 2023.
Des tensions au niveau de la chaine d’approvisionnement des médicaments
Ces difficultés financières sont à l’origine des tensions fréquentes au niveau des stocks des intrants et plusieurs insuffisances dans la chaine nationale d’approvisionnement en médicaments. Selon l’ONG Positive Generation qui œuvre pour la promotion du droit à la santé au Cameroun, les ruptures de stocks de médicaments antituberculeux sont fréquentes dans les hôpitaux du pays depuis le début de l’année 2023. L’ONG a ainsi enregistré des taux de rupture variant entre 9% et 20%, selon les mois et les régions. Ces ruptures de stocks ne peuvent qu’entraîner des conséquences néfastes sur la santé des populations affectées, notamment, la résistance aux médicaments antituberculeux.
Par ailleurs, de l’avis d’un spécialiste de la lutte contre la tuberculose au Cameroun qui a requis l’anonymat, les ruptures de stocks à répétition sapent la confiance du public, le financement national n’augmente pas de manière sensible, la contribution de la société civile reste peu visible et peut être qualifiée de folklorique, le traitement préventif court n’est pas introduit au Cameroun et la prévention concerne seulement les PVVIH et les moins de 5 ans.
Près de 25 286 cas de tuberculose sensible enregistrés au Cameroun en 2022
Ces cas ont été notifiés dans les 327 centres de diagnostic et de traitement que compte le pays, soit un accroissement de l’ordre de 10% par rapport à l’année 2021 avec 22 866 cas de tuberculose. Également, plus 174 cas de tuberculose multirésistante ont été notifiés dans 11 centres de prise en charge (25% d’augmentation par rapport à l’année précédente 139 cas), pour une initiation au traitement de 152 patients, soit 87% des cas notifiés.
Au niveau mondial, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le taux d’incidence de la tuberculose est de l’ordre de 164 nouveaux cas pour 100,000 habitants (OMS, 2022), avec une moyenne en valeur absolue de 45,000 nouveaux cas attendus par an, dont 10 à 12% pour la tuberculose pédiatrique. La tendance de l’incidence a diminué de 23% entre 2015 et 2021. Alors que le taux de mortalité est de 30 pour 100 000 habitants.