Être à la fois mère et père, voilà l’équation presqu’impossible à laquelle Stella doit résoudre. Son enfant pose des questions auxquelles elle ne sait pas toujours répondre :
Maman, qui est mon père ? Il est où ?
Chaque fois, le silence pèse un peu plus. Elle sait que l’absence d’un père influence l’éducation de sa fille, mais elle n’a pas d’alternative. Son travail, à peine suffisant pour survivre, l’oblige à des choix déchirants.
Je me sacrifie dans tous les sens du terme,
confie-t-elle
Nourrir, vêtir, instruire et soigner son enfant passe avant tout. Elle s’efface, s’oublie, repoussant sans cesse ses propres besoins.
Quant à l’amour, il semble être une route semée d’embûches.
Certains hommes n’aiment pas les mères célibataires, et quand l’un accepte, je me pose mille questions. Aimera-t-il ma fille comme la sienne ? Ne lui fera-t-il pas du mal juste parce qu’elle n’est pas de son sang ?
, s’interroge-t-elle sans réponse.
La peur l’emprisonne, la solitude devient une protection. Ironiquement, Stella n’est pas seule pour élever sa fille. Quelqu’un d’autre en a pris la charge, lui permettant de travailler. Mais ce soutien a un prix. Chaque jour qui passe, elle s’éloigne un peu plus de son enfant.
Nous sommes distantes, et même si elle m’aime, est-ce qu’on aura cette complicité mère-fille ?,
une question lancinante, qui la hante
. Le jour où elle devra reprendre pleinement son rôle de mère, sera-t-elle capable d’imposer son mode d’éducation ?
Un regard social impitoyable
Dans l’imaginaire collectif, une mère adolescente est une femme brisée, incapable de bâtir un avenir. Stella l’a compris très tôt.
Pour la société, notre vie s’arrête là. On ne peut plus rien faire sans l’aide des autres,
conclut-elle.
Se reconstruire ? Difficile, quand le regard des autres vous enferme dans une case. Se marier ? Un obstacle de plus.
On pense que, tôt ou tard, on retournera avec le père de notre enfant. Alors, on nous évite ,
affirme-t-elle.
Et puis, il y a cette dévalorisation constante, ce sentiment d’être perçue comme une erreur de parcours. Comme si être mère adolescente était une condamnation à vie, une faute impardonnable.
Pourtant, des efforts sont faits. Le ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille (MINPROFF) œuvre à l’inclusion des mères célibataires en promouvant leurs droits et en luttant contre les discriminations. Le Cameroun a aussi rejoint le Projet d’Autonomisation des Femmes et du Dividende Démographique au Sahel (SWEDD), qui vise à améliorer l’accès des adolescentes aux services de santé reproductive et à l’éducation.
Mais ces initiatives restent encore limitées. Un rapport de 2023 sur les droits de la personne au Cameroun souligne que, bien que des actions existent pour soutenir les femmes vulnérables, elles manquent souvent de cohérence et d’efficacité. La réalité de terrain est bien différente des politiques annoncées.
L’histoire de Stella est celle de nombreuses jeunes mères célibataires au Cameroun. Derrière chaque parcours, il y a une lutte silencieuse contre les inégalités, le mépris et la précarité. Ces femmes ne demandent pas la charité, mais des opportunités. Il est essentiel que les politiques existantes soient renforcées et appliquées de manière concrète. La société civile, les ONG et les communautés locales doivent jouer un rôle actif en offrant des réseaux de soutien, en sensibilisant le public et en luttant contre la stigmatisation.
Par Gaëlle Stéphanie MENGA
Redacción correcta y perfecta. Mucho ánimo a ella y a su hija 🙏 que está cuidando sola. Un día, sacarás adelante con este cargo que a simple vista parece que no pesa pero acercándose gracias al artículo leído,se tuerce el asunto.